Conférence de presse du 09 Août 2006

Publié le par Jean-Christophe BOUISSOU

Les représentants de RAUTAHI à l’Assemblée de la Polynésie française ont souhaité attendre la réaction du représentant du gouvernement, M. Jacqui DROLLET, avant de rendre publique leur analyse sur les travaux en session extraordinaire de l’Assemblée ainsi que sur la situation budgétaire et financière du pays au regard d’indicateurs objectifs.

Aussi, la présente conférence de presse portera sur les sujets suivants :

  • Les enjeux du 3ème collectif budgétaire 2006 voté par la majorité UPLD,
  • La situation financière désastreuse du pays, suite aux ajustements budgétaires,
  • Le saupoudrage clientéliste du budget d’investissement sur fond de désastre financier,
  • Les perspectives de l’année 2007 : Quelle est la marge de manœuvre du gouvernement ?

1) Les enjeux du 3ème collectif budgétaire 2006

Comme l’a déclaré RAUTAHI en discussion préalable à l’étude du nouveau document budgétaire du gouvernement, le collectif n° 3 est un véritable chambardement. C’est un chambardement car, à sa lecture, on comprend que le gouvernement TEMARU a le couteau sous la gorge.

D’abord parce que ce gouvernement est trop dépensier, puisqu’il va consacrer 1,360 milliards de francs pour les besoins du fonctionnement courant du gouvernement et de son administration, dont 500 millions seront consacrés aux dépenses de personnel de remplacement ou de paiement d’heures supplémentaires. Ces dépenses doivent normalement être prévues au budget primitif. A défaut, se pose inéluctablement la question de la sincérité des budgets préparés par le gouvernement TEMARU.

Ensuite, parce que Oscar TEMARU doit répondre de ses compromissions à l’égard des représentants des îles, lesquels l’ont rejoint avec « intérêt » pour maintenir artificiellement en vie sa majorité recomposée.

Enfin, parce que le gouvernement et sa majorité sont aujourd’hui dans l’obligation de compenser sur les réserves budgétaires, les financements perdus de l’Etat en raison, comme chacun le sait, des rendez-vous manqués du Président du gouvernement à Paris.

Ce budget s’inscrit en dehors de la réalité de vie des polynésiens

Ce nouveau budget s’inscrit en dehors de la réalité que vivent au quotidien nos concitoyens. Sans mésestimer l’importance des îles éloignées, RAUTAHI insiste pour rappeler que 75% de la population globale vit sur l’île de TAHITI. Cette population provient aussi des migrations depuis les archipels pour des raisons liées notamment aux études des enfants ou pour le travail.

S’agissant par exemple de la cherté de la vie, le gouvernement n’a prévu aucune action en faveur d’un allègement des impôts et taxes perçus auprès des contribuables. Il s’y était pourtant fortement engagé lors de la dernière campagne électorale. Un récent sondage auprès de la population démontre que 92% des personnes interrogées demande des actions concrètes dans ce domaine.

Autre sujet de préoccupation, la circulation routière. Elle constitue un véritable calvaire pour les automobilistes et les familles qui se rendent tous les jours sur la capitale ou dans nos villes pour travailler ou pour déposer leurs enfants dans les lycées ou collèges. A ce propos, le gouvernement actuel a décidé d’abandonner le projet PUNAPA censé remplacer la voie expresse TE ARATAI jugée inacceptable. Aucune solution de règlement des problèmes de circulation ou de transport public n’est ainsi envisagée dans le cadre du budget 2006.

En matière d’emploi, les chômeurs sont aujourd’hui plus nombreux. A défaut d’une relance de l’activité économique qui seule est capable de fournir un emploi durable aux jeunes qui arrivent sur le marché du travail chaque année, le gouvernement ne propose que des mesures d’aide sociale à l’emploi (ICRA ou CEPIA), lesquelles visent uniquement à remplacer les dispositifs DIJ ou CIG. Par ailleurs, les perspectives de développement par la création d’un nouveau pôle d’activités sur TARAVAO viennent de partir en fumée avec l’abandon du projet par le gouvernement (voir collectif n° 3).

Que dire également du domaine du logement social pour les plus démunis ? Le gouvernement les a littéralement oubliés, balayés d’un revers de main, lorsque l’on considère que seule une enveloppe de crédits de paiement de 350 millions de francs vient de leur être consacrée au collectif. De quoi construire un programme de 80 fare en bois seulement, alors que les besoins sont largement supérieurs.

2) La situation financière désastreuse du pays, suite aux ajustements budgétaires

Bref, nous arrêtons là l’énumération de ce qu’aurait dû être la feuille de route du gouvernement polynésien, si ce dernier avait pris en compte les aspirations normales de la population, pour aborder ce qui apparaît être la « substance » du nouveau budget de l’année en cours.

La majorité UPLD a voté en faveur d’une augmentation de près de 15 milliards de francs du budget primitif 2006, hors réaménagement de la dette. Pour ce faire, elle épuise les réserves du pays en mettant en péril sa capacité d’intervention ultérieure en cas de nécessité :

 

Situation des réserves de la Polynésie française

Montants

Solde

fiche annexe n° 1

 

 

 

 

 

Résultat de fonctionnement cumulé au 1er janvier 2005 (rappel)

9 226 922 743

 

Résultat de l'exercice 2005

6 954 262 162

 

 

 

 

Résultat cumulé au 31 décembre 2005

 

16 181 184 905

 

 

 

Prélèvement effectué lors du collectif n° 1

2 009 820 000

14 171 364 905

pour financer les moins-values dues à la décision du Conseil d'Etat

 

 

 

 

Prélèvement effectué lors du collectif n° 2

7 869 865 477

6 301 499 428

Financement des reports de crédits d'investissement

 

 

 

 

 

Prélèvement effectué lors du collectif n° 3

6 301 494 027

5 401

Equilibre du budget de fonctionnement

 

 

 

Le tableau ci-dessus expose la situation préoccupante dans laquelle se trouvent aujourd’hui les réserves du pays avec un solde de 5.401 francs CFP. Il faut ajouter à cela la diminution de la capacité d’autofinancement du budget d’investissement qui passe de 2,8 milliards de francs à seulement 0,7 milliard au 3ème collectif après une nouvelle ponction de 2,1 milliards de francs pour satisfaire l’équilibre du budget de fonctionnement qui augmente de 9,1 milliards de francs.

Enfin, estimant certainement que ce tableau n’est pas en soi suffisamment alarmant, le gouvernement propose d’endetter plus encore le pays en l’autorisant à contracter une rallonge d’un montant de 5,4 milliards de francs portant ainsi le recours total au crédit pour 2006 à 17,7 milliards de francs.

Contrairement à ce qu’affirme le Ministre des finances, ce nouveau concours bancaire ne s’explique pas par la nécessité de lancer de nouvelles opérations. Il s’explique tout simplement par le résultat déficitaire de la section d’investissement constaté fin 2005, comme le démontre le tableau suivant, et qui nécessite d’être couvert :

 

Résultat cumulé de la section d'investissement

Montants

Solde

fiche annexe n° 1 (colonne 1)

 

 

 

 

 

Résultat d'investissement cumulé au 1er janvier 2005 (rappel)

1 298 034 449

 

Résultat de l'exercice 2005

-7 076 913 492

 

 

 

 

Résultat cumulé au 31 décembre 2005

 

-5 778 879 043

 

Ce déficit nécessite en effet d’être comblé par l’appel à l’emprunt, aux fins d’éviter d’obérer le financement des opérations d’investissement normalement prévues au budget 2006, lesquelles sont également couvertes par un emprunt de 12 milliards de francs prévu au budget primitif.

En cas de réalisation des emprunts prévus cette année, l’encours de la dette se monterait en fin d’exercice à 85 milliards de francs. Jamais pareil endettement n’aura été atteint par le pays. Cette réalité va à contresens des déclarations politiques d’Oscar TEMARU avant les élections territoriales, lesquelles affublaient l’ancien gouvernement « d’hypothéquer l’avenir des générations futures par l’endettement massif du pays ».

Il est rappelé que le taux d’endettement annuel du pays est de 9,83% (10,8 milliards de remboursement annuel - intérêts compris - sur 110 milliards de recettes de fonctionnement) et que contrairement aux déclarations de M. Jacqui DROLLET, la Polynésie ne peut se permettre un alourdissement du poids de sa dette. En effet, où irions-nous chercher 20 milliards de francs supplémentaires à rembourser aux banques en cas d’endettement à hauteur de 30% de ses capacités, comme il se plaît à le répéter partout ?

3) Le saupoudrage clientéliste du budget d’investissement sur fond de désastre financier

Abusant de ses pouvoirs à la direction du pays, le gouvernement n’hésite pas à inscrire 15,6 milliards de francs en autorisation de programmes nouveaux afin de « remercier » gracieusement sous nos yeux ces « chers » élus des archipels. Oscar TEMARU qui s’est toujours drapé de grands principes en se coiffant de l’auréole de la probité en politique, en est réduit aujourd’hui à réaliser de basses manœuvres politiciennes abjectes et indignes, afin de conserver ses privilèges et ses illusions !

Car, en effet, à y regarder de plus près, ce collectif va lui permettre d’arroser et de satisfaire sa politique clientéliste, en oubliant ce que souhaite prioritairement la population. Il compte ainsi :

  • Attribuer une enveloppe de 4,1 MDF aux Tuamotu pour les remercier de leur « bonne compréhension »,
  • Affecter une autre enveloppe de 1,2 MDF aux Marquises pour leurs « bons soins »,
  • Mais il oublie au passage les Australes et sa promesse d’y construire un aéroport international, puisqu’il ne leur accorde que 540 MF,
  • Les ISLV, les mauvais élèves de la classe, ne recevront que 932 MF de son excellence,
  • Et les IDV, les véritables cancres de la classe, devront se débrouiller avec 4 petits milliards alors que ¾ de la population est en attente de règlement de nombreux problèmes.

4) Les perspectives de l’année 2007 : Quelle est la marge de manœuvre du gouvernement ?

Pour conclure, RAUTAHI ne peut que regretter, au travers de ce collectif, que le gouvernement ait décidé d’assécher durablement les réserves financières du pays, d’obérer sa capacité d’autofinancement en augmentant plus encore les dépenses de fonctionnement et d’alourdir le poids de la dette publique cette année encore de +17,7 milliards de francs.

Tout ceci, pour garantir un train de vie dispendieux, inefficace du gouvernement et permettre la préparation des prochaines échéances électorales des présidentielles, législatives et communales.

Depuis l’accession au pouvoir d’Oscar TEMARU, le pays traverse une crise sans précédent. C’est ainsi que le gouvernement vient d’être sanctionné par l’agence de notation Standard & Poor’s pour cause de « gestion hasardeuse des finances publiques », plaçant désormais le ratio de confiance de la Polynésie française au même rang que celui des îles Cook. Mais en réalité, c’est la population tout entière qui en pâtie. Ceci n’augure rien de bon pour l’avenir.

Cet avenir qui se dessine pour 2007 laisse peu de marge de manœuvre dans le cadre du prochain budget puisque les réserves du pays sont désormais asséchées, vidées. L’avenir nous réserve d’autres mauvaises surprises avec le projet « TE AUTAEAERAA », puisque le gouvernement compte :

  • Créer un nouvel impôt frappant les salariés : La contribution de solidarité universelle (CSU),
  • Augmenter le niveau de prélèvement de la TVA,
  • Instaurer une nouvelle taxe sur le chiffre d’affaires des entreprises,
  • Annuler les allègements d’impôts consentis par le passé en matière d’impôt sur le bénéfice des sociétés (IS) et d’impôt sur les transactions (IT).

Tout ceci génèrera un nouveau dérapage des prix et un appauvrissement de notre population.

Publié dans Archives RAUTAHI 2006

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